Falta mucho camino. He intentado calcular la distancia y creo que deben ser unos diecinueve kilómetros. Todos los días para allá y para acá, treinta y ocho kilómetros que mis zapatos resisten con alambre y neoprén. A medida que amanece, el frío se hace más intenso. Casi no siento pies ni orejas. Cruzamos extensos potreros donde la hierba mojada sobrepasa las rodillas. Estamos subiendo, bordearemos dos cerros hasta llegar a una enorme explanada arbolada de raulíes. El sendero se angosta y debemos ir apartando las ramas de litres y zarzamoras. Dejan arañazos en la piel que durarán varios días. Ya está aclarando y el cielo negroazulado no da tregua al par de luceros que se resisten a desaparecer. El bolso con comida que llevo al hombro se hace más pesado a cada paso. Sólo el pensar que pronto prepararé el desayuno me permite ahuyentar la fatiga. Siempre me ha gustado preparar el desayuno, aunque no es fácil encender el fuego. Las ramas y palos que encuentro suelen estar húmedos o escarchados. Debo soplar tanto que quedo extenuado, pero es gratificante ver hervir el agua en los tarros, sacarlos del fuego con guantes de sacos viejos, introducirles la bolsita de té y un par de cucharadas de azúcar. Nos toca a cada uno un robusto pan amasado y un tomate que se rebana con la premura que el hambre demande, luego un poco de sal y ya tenemos el mejor desayuno del mundo.
Le jour se lève sur Maitenal (conte)
Il fera jour dans plus de trois heures. Il fait froid et nous marchons d’un pas pressé. Papa a un peu de mal à marcher et il ne peut regarder que devant lui parce qu’il porte un paquet de sacs sur une épaule et une fourche et une pelle sur l’autre. Il tousse de temps en temps ou siffle une mélodie. J’essaie de me réveiller complètement, de penser plus clairement pendant que j’avance. Les toilettes étaient couvertes de givres alors je n’ai pas pu me laver le visage. Je le ferai peut-être, quand le soleil se lèvera, dans les canaux d’irrigation que nous devons traverser. De toute façon cela n’a aucune importance, je serai vite très sale et personne ne me verra de toute la journée.
Le chemin est encore long. J’ai essayé de calculer la distance et je crois que cela doit faire dix-neuf kilomètres. Tous les jours par monts et par vaux, trente huit kilomètres que mes chaussures supportent grâce à du fil de fer et du néoprène. Au fur et à mesure que le soleil se lève le froid devient plus intense. Je ne sens presque pas mes pieds ni mes oreilles. Nous avons traversé de grands pâturages où l’herbe mouillée arrive au dessus du genou. Nous montons, nous longerons deux collines jusqu’à arriver à une énorme plaine boisée de raulis(Nothofagus alpina). Le sentier se resserre et nous devons écarter les branches de litre(Lithraea caustica) et de ronces. Elles laissent des griffures sur la peau qui restent plusieurs jours. Le ciel s’éclaircit déjà et le bleu foncé n’offre plus de trêve aux dernières étoiles qui rechignent à disparaître. Le sac de nourriture que je porte à l’épaule devient plus lourd à chaque pas. Le simple fait de penser que je préparerai bientôt le petit-déjeuner me permet de chasser la fatigue. J’ai toujours aimé préparer le petit-déjeuner, bien qu’allumer le feu ne soit pas facile . Les branches et les bâtons que je trouve sont souvent humides ou couverts de givre. Je dois tellement souffler que je finis exténué, mais il est gratifiant de voir l’eau bouillir dans les pots, de les sortir du feu avec des gants faits de vieux sacs, d’y introduire un sachet de thé et une ou deux cuillères de sucre. Chacun de nous à droit à un robuste petit pain et à une tomate que l’on coupe en tranche avec la hâte que la faim exige, puis un peu de sel et voilà le meilleur petit-déjeuner du monde.
Nous sommes presque arrivés. Monter des collines n’a pas suffi à nous réchauffer. Mes habits sont mouillés par la rosée, mon corps tremble et je claque des dents. Papa ne siffle plus et semble fatigué.
Nous sommes arrivés.
La perche fume toujours. Aujourd’hui, nous devrons l’éteindre et
déterrer le charbon. Après avoir allumé un feu, je descends jusqu’à la rivière
chercher de l’eau pour préparer le petit-déjeuner.
Nous mangeons en silence. Dans ma tête, je fredonne des chansons à la mode, un air de Michael Jackson et des refrains entêtants de Miguel Bosé. C’est ma façon de rester connecté avec ce monde situé au-delà des montagnes, de ces forêts vierges où on ne peut aspirer autre chose que de voir de temps en temps un berger solitaire avec ses chèvres ou un autre charbonnier aussi silencieux et renfrogné que nous. Ce qui me réconforte c’est que mars arrivera bientôt et que je retournerai à l’école.
J’y inventerai des histoires et je sais que mes camarades feront de même. Hormis quelques privilégiés, pour les autres, la vie est dure mais personne ne l’avoue. Nous sommes tous allés à la plage, nous avons fait des balades en voiture et avons eu des histoires de cœur. Souvent nous en arrivons à croire à nos propres histoires et nous nous réjouissons de choses que nous n’avons jamais faites. C’est la seule façon de protéger notre orgueil. Mon estomac se noue quand je pense que cette année j’aurai beaucoup de professeurs. Maman est fière de moi parce qu’elle pense que ceux qui arrivent jusqu’en quinto básico ( CM2) sont de vrais hommes.
Papa a recommencé à travailler. Pendant des heures la pelle n’aura pas de répit et je devrai aller chercher de l’eau à la rivière si souvent que je me sens déjà fatigué. Si un minuscule bout de charbon reste allumé pendant la nuit , tous les efforts que nous avons fournis auront été inutiles.
Papa sait calculer l’heure et à midi il m’appelle et nous
buvons un pichet rafraîchissant de harina tostada (farine torréfiée).Nous contemplons ce que nous avons fait. Papa recommence
à siffler des mélodies. Je crois savoir à quoi il pense. À part lui et maman , nous sommes quatre
bouches qui doivent être alimentées tous les jours et cette année trois d’entre
nous irons à l’école.
Nous recommençons le travail. C’est l’heure la plus
étouffante et le sol brûle impitoyablement. Nous ne pouvons pas nous reposer à
nouveau car tout doit être dégagé et éteint aujourd’hui.
Les heures passent, le soleil se couche et tout semble en
ordre. Papa dit que c’est bon, que nous devons rentrer. Il jette un dernier
regard pendant qu’il met la pelle et la fourche à l’épaule. De mon côté, je
range les sachets de thé, le sucre et la harina tostada et nous
commençons à descendre. Je pense à maman qui doit être en train de nous
attendre avec du pain chaud et une salade de tomate avec de l’ail, des oignons
et de la coriandre. Cela me met l’eau à la bouche et j’accélère le pas, mes
pieds semblent léviter sur les nuages , les blessures sont oubliées et les
premiers oiseaux de nuit fredonnent avec moi des chansons de Dyango.
Après un bon moment, je m’arrête pour attendre mon père qui
est resté très en arrière. La nuit est tombée complètement et le craquement de
ses pas le trahit à peine. Cette fois-ci il ne siffle pas . Je crois qu’il sent
que cette nuit, comme cela lui est arrivé tant fois, il peut tout perdre.
Fin
Note de l’auteur : ce conte, ou récit, a gagné
une mention spéciale dans les années 94 en Argentine. Il s’agissait d’un
concours international de conte court.
Les organisateurs m’avaient envoyé les diplômes et les médailles
correspondantes qui sont rangées dans une malle de mon passé. Il reviendra aux
archéologues littéraires du futur de trouver dans quelle maudite malle ils se
trouvent , parce que je n’en ai aucune idée.
*Nothofagus alpina
*Lithraea caustica
*Farine torréfié
Traduit par Fabienne Sorin Hernandez le 12 juin 2021
Entrañable relato, me ha llevado en un viaje mágico hacia el tiempo el lugar y los sentimientos del protagonista, dejando tras si la nostalgia de esos momentos vividos, como si le hubiese acompañado en ellos.
ResponderEliminarLo felicito, Muzam
Jorge, te leo y te veo, años atrás mientras recorres esos caminos, cansado y polvoriento. Probablemente, tu excesente prosa tuvo mucho que ver en ese deambular diario mientras disfrutabas del entorno. Nada resulta más sugerente e inspirador para un escritor que enfrentarse a diario, introducirse en la propia naturaleza. Es cuando mejor se piensa, cuando mejor se siente. Por ende, cuando mejor se escribe.
ResponderEliminarEl emblema de la escena (vertical, la subida de la montaña y su
ResponderEliminardescenso) conecta perfectamente con el monólogo interior del
personaje en horizontal.
Dos planos, dos emblemas: el orgullo de la subida y la humildad
y aceptación del descenso. Aquí hay filosofía. Ibsen y Shakespeare.
Donne y el Sermón de la Montaña.
Esta línea es dura y altamente tonificante. Me llevó a Günter Grass
y su familia cachuba. Buena literatura. Honesta. Telúrica.
Reina una gran espiritualidad aquí. Danos más, Padrone.
Un cuento que se escribe con un fragmento de la propia vida cobra una segunda vida. Una mejor vida porque se hace realidad para quienes lo leen. Me gusta mucho este tipo de narrativa.
ResponderEliminarTuve el privilegio d leer esta obra maestra en su formato original, unas hojas tecleadas en maquina d escribir bulliciosa. Antes y ahora me declaro admirador d tanta perfeccion narrativa y vuelvo a releerlo una y otras vez.
ResponderEliminarTuve el privilegio d leer esta obra maestra en su formato original, unas hojas tecleadas en maquina d escribir bulliciosa. Antes y ahora me declaro admirador d tanta perfeccion narrativa y vuelvo a releerlo una y otras vez.
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