Nomadismo lector / Nomadisme lecteur


Un peuco alborotador de gallinas somnolientas se ha cebado a nuestro campo. El escándalo comienza a las seis treinta de la mañana, o sea, cuando la luz del alba no permite distinguir enteramente las propias manos. Quizá esto ocurriría más tarde, si no fuera porque hay gallinas excesivamente madrugadoras, tal como las hay trasnochadoras (creo que podría escribir un libro aparte sobre psicología de pollos, gallinas y gallos. No lo estudié, pero lo aprendí observando su encorocado trajinar cada largo día de cada largo año durante toda mi infancia. Sé hasta lo que piensan. Lo que sospechan. Sus alegrías, tristezas y engaños, sus recursos finos para sobrevivir, incluso para doblegar y hasta torturar a sus semejantes)

Como decía, el peuco se ha zampado varias aves de mi madre. Desayuna muy temprano, y casi anocheciendo vuelve a cenar a las trasnochadoras. Así que son dos escándalos diarios asegurados.

Probablemente mi vida ha sido condicionada por los peucos, pues despierto naturalmente muy temprano. Y esto me llevó ya en mis tiempos de ciudad a ocupar ese fructífero tiempo donde nadie más se levantaba, en leer montañas de libros y escribir sobre cuadernillos que luego iba perdiendo.

Ese silencio matinal propiciado por los peucos alborotadores de mi infancia es el causante indirecto de mi obra, de mi cultura y hasta cierto punto de no pocos rasgos de mi personalidad, pues, y aquí solo elucubro, ese silencio madrugador me conectaba con mi mismo, me convertía en un nómade lector, y me tornaba un solitario, un buscador de soledades, mías y de otros, un explorador más que un aventurero, caminante de llanuras y trepador de montes, enturbantado para el sofoco desértico, refugiado entre bosques bulliciosos de especies, solo premunido de cantimplora y bastón de palo, y desde mi morral, apenas asomados, una hoz y un martillo, herramientas herrumbrosas, heredadas de ancestros de rostros esculpidos por vientos y soles, abuelos que nadie pudo doblegar, y con las que iba sembrando ingenuas semillas de dignidad humana.

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Nomadisme lecteur

Un peuco* agitateur de poules endormies s’est acharné sur notre
champ. Le scandale commence à six heures trente du matin, c’est à
dire quand la lueur de l’aube ne permet pas de distinguer
complètement ses propres mains. Peut-être que cela se produirait
plus tard s’il n’y avait pas de poules si matinales, tout comme il en
existe des couche-tard (je crois que je pourrais écrire un livre à
part sur la psychologie des poulets, poules et coqs. Je n’ai pas
étudié le sujet, mais je l’ai appris en les observant s’affairer en
choeur durant toutes les longues journées de toutes les longues
années de toute mon enfance. Je sais même ce qu’elles pensent. Ce
qu’elles soupçonnent. Leurs joies, leurs tristesses et leurs
tromperies, les fins stratagèmes qu’elles emploient pour survivre,
soumettre et même torturer leurs semblables).
Comme je le disais, le peuco a avalé plusieurs volatiles de ma
mère. Il déjeune très tôt et, lorsque le soleil va se coucher, il
revient manger les couche-tard. Ce sont donc deux scandales
assurés par jour.
Ma vie a probablement été conditionnée par les peucos car je me
lève naturellement très tôt. Et cela m’a conduit au temps où je
vivais en ville à occuper ces moments fructifères où personne n’était
réveillé à lire des montagnes de livres et à écrire sur des petits
carnets que je perdais régulièrement.
Le silence matinal offert par les peucos fauteurs de troubles est la
cause indirecte de mon oeuvre, de ma culture et jusqu’à un certain
point d’un nombre important de traits de ma personnalité, car, et je
ne fais ici qu’élucubrer, ce silence matinal me connectait à moi-
même, me transformait en lecteur nomade, faisait de moi un
solitaire, un chercheur de solitude, des miennes et des autres, un
explorateur davantage qu’un aventurier, marcheur des plaines et
grimpeur de monts, enrubanné contre la suffocante chaleur du
désert, réfugié dans les bois bruyants d’espèces, muni seulement
d’une gourde et d’un bâton, et de ma sacoche, une faucille et un
marteau se penchaient à peine, outils rouillés, hérités d’ancêtres
aux visages sculptés par les vents et les soleils, des grands-pères
que nuls ne put faire plier, avec lesquels j’allais semant de naïves
graines de dignité humaine.




Jorge Muzam, cuadernosdelaira.blogspot.com
Traduit par Fabienne Sorin Hernandez le 12 juin 2020
*Peuco: busardo, faucon de Harris.

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